Jeudi soir, la Nuit de l’Amitié organisée par la Licra et l’association LGBTI La Station, a rencontré un franc succès. Près de 150 personnes ont participé à cette deuxième édition sur le thème du complot jusqu’à une heure du matin.
Dans une première conférence, Marc Henry, Grand Maître de la Grande Loge de France, est revenu sur les théories du complot judéo-maçonnique. Cette accusation repose sur deux fantasmes : « les juifs voudraient de l’argent et les maçons du pouvoir ». Une incrimination bancale pour le Grand Maître qui rappelle qu’au 18ème siècle, les juifs n’étaient pas admis dans la franc-maçonnerie française. Le même sort était réservé aux personnes homosexuelles et aux femmes. Ce n’est que plus tard que les loges s’ouvriront à eux.
Une retransmission sur grand écran a permis au public
qui n’avait pas pu accéder à la salle comble, dans laquelle
se tenaient les conférences, de les suivre en direct
depuis le hall d’entrée de La Station.
L’ancien psychologue a rappelé les valeurs de la franc-maçonnerie d’aujourd’hui, qui s’appuient sur la réflexion, la diversité des opinions et des cultures, et surtout le rejet des extrémismes en ces temps mouvementés. Il écarte ainsi les rumeurs qui circulent actuellement sur la toile et qui affirment que les maçons seraient les financeurs de Daesh. Une action en justice est en cours pour faire cesser ces discours. Ni secrets ni complots donc, même si la franc-maçonnerie reste discrète sur les travaux menés par ses loges et les rites d’initiation de ses membres.
Marc Henry a ensuite répondu aux questions de la salle, notamment sur les sujets importants qui animeront notre société. Plusieurs travaux franc-maçonniques sur la laïcité sont à l’étude, et l’Europe est apparue comme un thème central au Grand Maître.
Illuminati, lépreux et sorcières
Après un interlude musical, Jacob Rogozinski, professeur de philosophie à l’université de Strasbourg, a évoqué, au cours d’une deuxième conférence, diverses théories du complot, des Illuminati, aux lépreux en passant par les sorcières. Le philosophe préfère d’ailleurs parler de mythe plutôt que de théorie, puisque « la théorie est un ensemble de concepts servant à expliquer la réalité, alors qu’en l’occurrence, il n’y a pas de concepts, pas de vérité, il y a du délire, du mythe ».
Derrière ce mythe, il y a toujours, selon lui, la figure d’un ennemi caché et mauvais, qui se déguise en son contraire. Ainsi, qu’il s’agisse d’un parti républicain, d’une église, d’une association ou même de l’Etat, rien ni personne n’est à l’abri des discours conspirationnistes. Des propos parfois tenus par des jeunes, à la fois hyper-sceptiques par rapport aux discours officiels et hyper-crédules face à quelques vidéos trouvées sur internet. « Il y a une jouissance à démasquer » explique Jacob Rogozinski.
Ces fabulations ont le vent en poupe surtout après des événements « inattendus et imprévisibles », avec la volonté de tout expliquer « à partir d’une cause unique ». Le nazisme fut un exemple de cette vision dogmatique, présentant les juifs comme la cause de tous les maux. Ou plus récemment, diverses rumeurs avaient circulé sur les frères Kouachi qui auraient été manipulés par les services secrets français ou la CIA. « Le complot a encore de très beaux jours devant lui » a conclu Jacob Rogozinski.