C’est une habitude bien établie à présent, la Licra Bas-Rhin est sollicitée par les établissements scolaires à l’occasion du Mois de l’autre, initiative de la Région Alsace pour initier débats et réflexions autour des racismes.
Le racisme au quotidien, les discriminations, vécus et partage d’expériences alimentent ce temps de discussion entre élèves, enseignants et intervenants de la Licra. Rien de très scolaire dans ce type de rencontres: la parole est libre et les thèmes abordés s’enchainent rapidement au fil d’une discussion qui se déroule tant entre les élèves qu’avec les intervenants de la Licra.
Un travail préparatoire réalisé par les enseignants sur la discrimination à l’embauche permet de lancer le débat. Discrimination à l’embauche, un sujet loin des préoccupations d’un élève de première ? Pas si sûr ! Car dans le vécu de ces jeunes, certains ont déjà rencontré des difficultés à trouver un stage en raison d’un nom d’origine étrangère ou d’une adresse située dans un ”mauvais” quartier.
D’autres partagent des situations de discriminations dans le monde des loisirs ou de la vie quotidienne. Des problèmes rencontrés pour entrer en discothèque, jusqu’aux difficultés d’une mère d’une élève, portant un nom alsacien mais étant d’origine maghrébine, qui a vu de nombreuses pistes de logement se fermer après que les propriétaires se sont rendus compte de cette réalité.
La Licra explique alors ses missions et actions visant à ne pas laisser impunis des actes qui relèvent du racisme et de l’antisémitisme. La réponse judiciaire n’est jamais facile car elle ne peut intervenir que lorsque les faits sont clairement établis même si des lois nous protègent pour empêcher de tels actes.
De nombreux témoignages individuels traduisent des tensions intercommunautaires au sein et en dehors de l’établissement : « Mon copain turc s’est fait prendre à partie par des Roms qui l’ont maltraité et ont posté sur facebook des images de la scène » commente une élève. « Kurde d’origine, je ne suis pas acceptée par la communauté turque et les gens ne comprennent pas que je ne suis pas musulmane » ajoute celle-ci. « Ma tante qui porte le voile se fait régulièrement prendre à partie dans le tram à Strasbourg » rapporte une troisième élève.
Partir de leur réalité pour ouvrir la discussion sur les origines du racisme intercommunautaire, les raisons historiques de certaines haines qui s’inscrivent souvent dans des conflits territoriaux ou des mythes construits sur l’ignorance. De nombreux sujets ont pu être abordés, des fondements de l’antisémitisme jusqu’à l’affaire Ilan Halimi, en passant par la définition de génocide, illustrée par la Shoah ou le génocide rwandais. Si les élèves ont dû retenir une chose, c’est qu’encore plus en période de crise, beaucoup cherchent des réponses simples ou des boucs émissaires. « En général, si vous vous intéressez vraiment au monde, alors vous ne pouvez pas être raciste. Essayez d’arrêter de tout simplifier » conclut Gilles Winckler, président de la section du Bas-Rhin de la Licra.