La deuxième édition du Jour de colère, qui avait réussi le triste exploit le 26 janvier de rassembler de la droite la plus réactionnaire jusqu’aux plus virulents supporteurs de Dieudonné, fut un échec retentissant. Malheureusement, en face, ce qu’on appelait jadis front républicain n’est guère en meilleur état. Face à la progression des idéologies intolérantes dans toute l’Europe, le camp républicain sera-t-il capable de s’unir à nouveau ?
La Licra Bas-Rhin, que j’ai l’honneur de présider, constate depuis plusieurs semaines, à travers les nombreuses sollicitations dont elle fait l’objet, une progression des tensions et des violences. Parallèlement, de nombreux nouveaux militants, de tous horizons culturels et politiques, sont heureusement venus la renforcer et se retrouver, malgré leurs divergences d’opinions, autour des valeurs fondatrices qui font notre fierté d’être des enfants de la République française.
Le contexte social actuel, le sentiment d’impuissance de l’Etat dans une économie mondialisée, et les scandales politiques à répétition, ont amorcé un compréhensible désenchantement qui se traduit dans les urnes par une abstention croissante et par la tentation de l’extrémisme.
Les mythes de la IIIème République ont connu une inévitable dégradation en 150 ans. Notre République, aujourd’hui désacralisée, est probablement devenue trop politicienne et trop technocratique pour être à nouveau génératrice d’espérance. La démocratie a mille défauts. Elle est indisciplinée, à la fois égalitaire et individualiste et sans doute trop plate et maussade. Pourtant, nous lui avons donné notre cœur et, quoi qu’il arrive, nous ne lui reprendrons pas, parce qu’elle a proclamé à jamais le droit égal de tous les hommes !
Ce n’est pas par des déclarations stéréotypées contre le fascisme et la guerre que nous parviendrons à libérer l’homme des anciennes chaînes qui entravent et des nouvelles chaînes qui menacent, mais par l’affirmation de notre fidélité inébranlable, même dans les moments les plus difficiles, aux puissances d’émancipation de l’esprit (1) que nous avons héritées des Lumières.
L’heure ne doit pas être au renoncement, mais au sursaut républicain !
Cette inscription mémorable que nous avons gravée sur nos monuments liberté, égalité, fraternité est la charte fondamentale des droits censée unir les hommes entre eux. Mais ces droits sont inséparables des devoirs que chaque citoyen se doit d’accomplir, en s’impliquant dans la vie de la Cité.
J’invite chacun à se mobiliser et à investir, à sa façon et à hauteur de ses possibilités, le champ démocratique, dans les associations défendant les droits de l’Homme, mais aussi dans la vie associative, sociale et politique en général.
Gilles Winckler
(1) André Breton, Discours au Congrès des écrivains, juin 1935